Vivekananda, un grand maître yogi, qui allie tradition et modernité. Son impact en Occident à la fin du 19ème siècle a été considérable.
Vivekananda marque une rupture dans l’histoire du yoga, car il est le premier à avoir amené en Occident cet art millénaire du yoga.
La vie de Vivekananda
Narendranath Dutta est né à Calcutta en 1863, d’une famille aisée : son père était juriste et philosophe et sa mère, très religieuse, lui a fait connaître très tôt les textes sacrés de l’Inde.
Il a été un élève puis étudiant brillant.
La question de Dieu était sa principale préoccupation et, vers 20 ans, il a adhéré à la « Société de Dieu » où des intellectuels discutaient de l’avenir des religions et de la réforme de l’hindouisme.
C’est à 17 ans qu’il a rencontré celui qui allait être son guru,
Ramakrishna,
un mystique entouré de disciples. Il est alors devenu samnyasin (renonçant) dans son ashram.
Il y prend le nom de Vivekananda : « viveka » veut dire « discernement » et « ananda » « béatitude ».
Quelque temps avant de mourir, Ramakrishna et lui ont eu une longue rencontre, au cours de laquelle tous deux auraient vécu une extase ; après cette rencontre, son maître l’a désigné comme son successeur.
Après la mort de Ramakrishna, il prend alors la direction de l’ashram ; le 25 décembre 1887, dans la nuit de Noël, il fonde « L’ordre de Ramakrishna » marquant par là son étroite parenté avec la religion chrétienne.
Dans les années qui ont suivi, il a alors vécu la vie d’un moine errant et mendiant, un saddhu, en traversant toute l’Inde. Il possédait en tout et pour tout un kamandalu (pot à eau) et deux ouvrages : la Bhagavad Gita et l’Imitation de Jésus-Christ.
Cette étape de sa vie,
en même temps qu’elle a augmenté sa conscience spirituelle, a augmenté aussi aussi sa conscience de la misère sociale.
Il en a tiré plusieurs conclusions :
- nul ne peut épanouir sa puissance spirituelle s’il vit dans une misère matérielle. Il faut donc travailler à l’élévation sociale du peuple, par l’éducation.
- la prospérité matérielle, qui est la grande force de l’Occident, n’est une véritable prospérité que si elle est subordonnée à la prospérité spirituelle. Il faut donc travailler à l’élévation spirituelle de toute l’humanité.
Paradoxalement, c’est donc cette marche à travers l’Inde qui lui a donné envie de propager les enseignements du yoga en Occident.
En 1893, avec l’aide financière d’un de ses disciples,
Il s’est rendu à Chicago à l’occasion de l’exposition universelle :
Il est intervenu à plusieurs reprises lors du Parlement des religions et son impact a été considérable. Lors de son discours d’introduction sur l’hindouisme le 11 septembre 1893, le public composé de 7000 personnes lui a fait une standing ovation.
Il a alors commencé à donner des conférences aux États Unis et de nombreux disciples l’ont rejoint.
Il a ensuite fait un tour du monde pour diffuser l’enseignement de Râmakrishna.
Son retour en Inde a été triomphal.
Il a créé la « Râmakrishna Mission » dans divers pays, et est retourné en Occident en 1899.
La biographie de Nikhilananda décrit comment Vivekananda n’avait éprouvé aucun mauvais ressentiment à être pris pour un Noir par les Américains.
En effet, il lui arrivait souvent, lors de ses voyages dans les états du sud-ouest américain, de se voir refuser l’entrée dans un hôtel, un restaurant ou chez un coiffeur à cause de la couleur sombre de sa peau. Alors que le Swami racontait ces anecdotes à l’un de ses disciples, ce dernier lui avait demandé pourquoi il ne leur répondait pas tout simplement qu’il n’était pas Noir mais Hindou. Vivekananda, indigné, avait rétorqué : « Comment ? M’élever aux dépens d’un autre ? Je ne suis pas venu sur Terre pour cela ! ».
Il est mort à l’âge de trente-neuf ans le 4 juillet 1902.
Une de ses disciples les plus proches est la mystique allemande Christina Greenstidel, (1866-1930) plus connue comme Sœur Christine.
Œuvre de Vivekananda :
L’impact de l’introduction en Occident du Vedanta par Vivekananda a été considérable.
Faite essentiellement de conférences, causeries, entretiens, son œuvre a été transmise par un fidèle disciple anglais qui prenait des notes en « sténo ».
Elle a été diffusée au public français par le biais de Romain Rolland, qui a publié un ouvrage remarqué sur La vie de Vivekananda et l’Évangile universel ; et par Jean Herbert, qui a fait des traductions et a édité plusieurs de ses ouvrages.
L’œuvre de Vivekananda est importante compte tenu de la brièveté de sa vie. Elle est restée très fidèle à l’enseignement de Râmakrishna, c’en est une synthèse religieuse et philosophique.
Elle a influencé de nombreux penseurs, dont le Mahatma Gandhi.
Certains aspects de la pensée de Vivekananda sont perçus comme traditionnels, d’autres comme très modernes.
Par exemple, Vivekananda plaçait l’Advaita Vedānta au sommet de la hiérarchie spirituelle, ce qui le situe dans la tradition.
Mais il se démarque nettement de la tradition en lui reprochant son illusionnisme cosmique et son quiétisme fataliste.
Vivekananda, lui, voulait changer le monde, pas seulement se libérer individuellement. À sa manière, il est perçu par certains comme un révolutionnaire, précurseur direct de Sri Aurobindo.
Vivekananda ne croit pas du tout que le Vedanta contredise la science de son temps.
Pour lui, le yoga est une science de l’esprit qui complète ce que l’Occident apporte sur le plan des sciences physiques.
Cette science de l’esprit n’a pas pour but la fuite du monde. Elle permet, comme la physique, d’accroître le pouvoir de l’homme sur l’univers. Elle est une puissance, une force de transformation.
C’est pourquoi il n’est pas question de rejeter le karma yoga (le yoga de l’action désintéressée) au seul profit du Jnana Yoga (yoga de la connaissance, de la philosophie). La connaissance sans l’action est stérile et l’action sans la connaissance est aveugle et fruste.
En ce qui concerne le bhakti yoga (le yoga de la dévotion), il reconnaît que l’amour est la plus haute forme de connaissance, lorsque l’objet et le sujet de la connaissance ne font plus qu’un.
Sa conception spirituelle lui faisait rejeter toutes superstitions et soumissions à des divinités chimériques. Il considérait le système de castes en Inde comme une coutume sociale opposée aux principes du Vedānta. Il s’élevait également contre le sectarisme, le fanatisme qui enferment l’homme dans une étroite prison mentale au lieu de l’universaliser.
Selon lui, les grandes religions ne sont pas destinées à disparaître. Mais, comme il y a plusieurs types spirituels, il y aurait plusieurs religions qui correspondent à chacun de ces types. Plus une religion est universelle, plus elle se particularise en fonction du besoin de chaque personne.
Critiques de l’oeuvre de Vivekananda :
Le Mahatma Gandhi a dit de lui qu’il avait
« maintenu l’hindouisme dans un état de splendeur en enlevant le bois mort de la tradition ».
Rabindranath Tagore aurait dit : « Si vous voulez connaître l’Inde, étudiez Vivekananda. Chez lui tout est positif ».
Pour Michel Hulin, on trouve chez Vivekananda « une séduisante alliance de la tradition et de la modernité, mais aussi un mélange explosif de mysticisme et de scientificité ».
Pour Jean Herbert, « Dans l’immense majorité des conceptions yogiques antérieures à Swami Vivekananda, la préoccupation centrale était d’accélérer l’émancipation individuelle du yogi, et celui-ci ne se préoccupait nullement d’influer sur le sort ou l’évolution de l’humanité. (…)
Swami Vivekananda se montra fidèle disciple de son maître lorsqu’il entreprit la double tâche de relever les conditions matérielles de l’Inde et de jeter en Occident des ferments de haute spiritualité ».
Quelques paroles de Vivekananda :
Ne parlez bas d’amour pour votre frère ! aimez !
Ne discutez pas sur les doctrines et sur les religions. Il n’y en a qu’une. Tous les fleuves vont à l’Océan. Allez et laissez aller les autres !
La grande eau se fraie le long de la pente (selon les races, les âges, et les âmes) un lit différent. C’est la même eau… Allez. Coulez vers l’Océan.
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