Noël en Inde est-il fêté ? De la même manière que chez nous ? Peut-on y voir une origine commune avec la fête la plus célébrée en Inde, Diwali ?
Tu es sans doute en plein préparatifs de Noël, à tes derniers cadeaux, à ton organisation… bref, dans l’effervescence de la préparation de ces fêtes de fin d’année !
Mais, toi qui aimes le yoga, t’es-tu déjà demandé comment cette fête d’origine catholique était célébrée en Inde ?
Et pourquoi, au-delà de l’internationalisation de notre monde, cette fête est-elle si largement suivie ? Peut-on trouver d’autres origines et des symboliques plus anciennes, en Inde ou ailleurs ?
Noël en Inde, comment cela se passe-t-il ?
Noël, bien sûr, est issu de la tradition chrétienne, ce qui n’est pas la tradition majoritaire de l’Inde, où les chrétiens ne représentent que 2,3% de la population. Mais, vu la taille du pays, cela constitue tout de même environ 30 millions de personnes, et est donc tout sauf anodin !
De plus, les Chrétiens sont loin d’être les seuls à fêter « Bara Din », le « grand jour « !
Quels sont les points communs entre Noël en Inde et Noël en France ?
Comme chez nous, Noël est un jour férié en Inde.
Les Indiens adorent les lumières, les couleurs vives et joyeuses, aussi Noël ne fait-il pas exception, tout comme chez nous.
Pour la plupart des Indiens non chrétiens, Noël est représenté par d’énormes arbres colorés, des Pères Noël et de la neige en coton ! Eh oui, même si, mis part l’extrême Nord Est de l’Inde, la neige n’est pas présente dans ce pays ! Sans oublier l’étoile des rois mages, omniprésente dans les décorations.
C’est aussi l’occasion de donner et recevoir de petits cadeaux, ainsi que des gourmandises.
Tout comme en France également, les magasins, les marchés et les centres commerciaux sont drapés de guirlandes multicolores et scintillantes, mais aussi de banderoles en papier et de fleurs.
Tout comme chez nous également, on se met sur son 31 pour fêter cela, avec un repas sortant de l’ordinaire !
Quelles en sont aussi les différences ?
Concernant l’arbre décoré tout d’abord : cela peut être un sapin en plastique mais, le plus souvent, comme nous sommes dans un pays tropical, les Indiens décorent des branches de manguier ou des feuilles de bananier, ce qui, pour nous, paraît bien exotique !
On accroche également des feuilles de bananier et manguier à l’extérieur de la maison, parfois tressées avec des soucis, en guirlandes nommées « toran ».
Quant au Père Noël, « Christmas baba », il n’est en général pas sur son traîneau tiré par des rennes, mais sous forme de sculptures sur les plages.
On prépare aussi des lanternes en papier, le plus souvent en forme d’étoile. On les utilise pour la décoration à l’intérieur et à l’extérieur de la maison ; on tisse parfois tout un réseau de lumière entre maisons voisines.
Dans le Sud de l’Inde, pendant tout le mois de décembre, les gens placent des petites lampes à huile en terre cuite (les mêmes que pour Diwali, nous verrons que ce n’est pas un hasard !) sur les toits plats de leurs maisons.
Même les églises disposent des lampes sur les tables et les rebords de fenêtres. Bien plus que chez nous, les églises sont décorées à l’aide de superbes mises en lumière et sont spectaculaires la nuit.
Quant aux cadeaux de Noël, ils ne sont pas aussi courants qu’en France : on s’échange plutôt de petites babioles ou des friandises, surtout pour les enfants.
Le repas de Noël en Inde
La plupart des familles ont un grand déjeuner, le 25, non le 24 au soir, et un dîner encore plus exceptionnel, avec des recettes familiales typiquement indiennes, délicieusement épicées et parfumées.
Nous pouvons citer les curries de poulet ou porc, le poisson grillé, le Kappa biryani, des plats au lait de coco pour le Sud de l’Inde, particulièrement au Kérala (comme ce Curry vg de lentilles corail au lait de coco) … et pour les douceurs du payasam (ou kheer, une sorte de riz au lait à la cardamome, aux raisins et aux pistaches ou cajou), du Neyyappam (des beignets sucrés à base de riz, frits dans du ghee) …
mais aussi une constante imprégnée de la présence britannique : le bon vieux pudding aux fruits secs variés, aux cajou et au rhum, un incontournable !
Noël chez les Chrétiens en Inde
La veille de Noël, les croyants assistent à la messe de minuit et écoutent les évangiles à l’église.
Les préparatifs de Noël commencent souvent au moins un mois à l’avance. Les gens nettoient complètement leur maison, la blanchissent à la chaux (comme pour Diwali), décorent le sapin ou l’arbre de Noël et font une crèche avec des figurines en terre cuite.
Et, dans chaque foyer chrétien indien, figure une étoile, dont le symbolisme est très marqué.
Noël dans les différentes régions de l’Inde
L’influence locale est très importante, les rituels ne sont pas les mêmes dans tout le pays.
Influence du passé colonial de l’Inde à Noël
Ouest de l’Inde
Dans le Nord, la ville de Mumbai (Bombay), portugaise puis britannique, abrite l’une des plus grandes communauté catholique romaine d’Inde.
Elle est très animée à l’approche de Noël. La rue et les maisons de Mumbai sont illuminées, on y trouve de nombreux marchés de Noël, les centres commerciaux sont en effervescence.
Mumbai est également réputée pour sa tradition de représenter des crèches et de décorer les maisons avec de grandes étoiles brillantes.
Plus au Sud, à Daman et Diu ainsi qu’à Goa, Dadra et Nagar Haveli,
qui ont été sous administration portugaise depuis le XVIème siècle jusqu’en 1961, la fête a gardé ses saveurs portugaises.
Beaucoup de touristes occidentaux, d’ailleurs, y apprécient les spectacles qui y sont organisés, comme la danse traditionnelle Corridinho, originaire de l’Algarve au Portugal, les services religieux qui n’en finissent pas, toutes les lampes éclairant la nuit … La messe de minuit est organisée dans toutes les églises locales et les gens la célèbrent avec faste et grandeur.
C’est à Goa, qui compte une grande population de Chrétiens, que l’on peut trouver la célébration la plus exubérante. Son architecture et sa culture conservent encore l’influence de la domination portugaise. Les catholiques de Goa participent aux services traditionnels de la messe de minuit appelés Missa de Galo (la messe du coq), car elle dure jusqu’au petit matin.
À Goa, Noël est autant fêté que Diwali.
De manière plus touristique, de grands festivals de danse y sont organisés sur la plage à Noël.
Si tu te trouves en Inde à ce moment, tu peux aussi en profiter pour aller écouter des chants locaux.
En effet, dans de nombreux États qui célèbrent Noël, des chorales commencent à chanter dans la ville une semaine ou deux avant le jour de Noël. Goa et Bandra, une banlieue de Mumbai, sont connus pour leurs chants festifs qui se prolongent tard dans la nuit.
Les chrétiens de la tribu Bhil chantent des chants de Noël nuit après nuit pendant tout le mois de décembre.
Encore plus au Sud, au Kérala,
les enfants portent des bougies et visitent les maisons de leur quartier en groupe, en chantant des chants de Noël. On peut voir des scènes issues de la Nativité jouées à l’extérieur des églises, qui sont illuminées.
Le Kérala a longtemps été un endroit avec une forte présence chrétienne. La tradition dit que l’un des 12 disciples de Jésus-Christ, l’apôtre Thomas, se serait rendu au Kerala en 52 après JC, et aurait converti douze familles malayali au christianisme.
Quoiqu’il en soit, le christianisme y était implanté non seulement avant la colonisation, mais même plus tôt qu’en Europe, puisque la présence des premières paroisses y est attestée dès le milieu du IIème siècle.
Et, de la même manière que pour Diwali, la fête des lumières, les chrétiens allument des lampes en argile qu’ils mettent sur les toits plats de leurs maisons, pour symboliser la victoire de la lumière.
Toujours pour célébrer Noël et la lumière, la nuit, c’est un festival de feux d’artifice où tout le monde se retrouve.
Est de l’Inde :
Tout au Nord, Shillong fête Noël avec faste et gaieté pendant un mois entier.
La cathédrale est la plus ancienne du nord-est de l’Inde et est extrêmement visitée. Pendant cette période, beaucoup de personnes sont vêtues de vêtements traditionnels, et de nombreux groupes et artistes jouent du gospel, dans les églises mais aussi dans la rue.
Kolkata (Calcutta) aussi a gardé trace de la présence britannique.
Ainsi, Park Street prend vie avec lumières, étoiles, décorations, les rues sont bordées de pubs et de bars qui restent ouverts toute la nuit, et la cathédrale Saint-Paul organise une messe de minuit avec de grands chants de Noël.
Au Sud, à Pondichéry, cet ancien comptoir français, la ville habituellement calme et sereine, avec son architecture coloniale et son plan régulier, s’illumine de décorations lumineuses et de l’ambiance festive de Noël. La gastronomie française y est toujours présente lors de la fête de Noël.
La symbolique de cette fête de Noël
Nous voyons donc que Noël en Inde est réellement fêté et, même s’il est davantage célébré, en effet, dans les États ayant un passé colonial et chrétien, les festivités vont bien au-delà de la seule communauté chrétienne.
La signification est à chercher derrière l’origine même de Noël.
Les Saturnales
On sait que Noël est né dans des temps très anciens, en marge du solstice d’hiver. Une période charnière, pendant laquelle avaient lieu, dès l’antiquité, de nombreuses célébrations vouées au culte du dieu des semailles et de la fertilité, Saturne. Ainsi chez les Romains, les Saturnales, qui se déroulaient du 17 au 24 décembre, semblent avoir un lien incontestable avec la « Nativité », que la chrétienté a plaquée sur cette célébration païenne.
La date de la naissance de Jésus n’a en effet été officiellement arrêtée que 4 siècles plus tard par le Pape Libère, et nous savons, grâce au nouveau Testament et à des tablettes cunéiformes retrouvées en Mésopotamie, sur le site d’un observatoire près de Bagdad, que Jésus est sans doute né vers -7 avt JC (!). Si le sujet vous intéresse, vous pouvez aller voir cet article.
Shab-e Yaldâ
Mais les Saturnales, et par conséquent Noël, ont une origine encore plus ancienne.
On peut aller voir du côté de l’Iran où, lors du solstice d’hiver le 21 décembre, on fête Shab-e Yaldâ, depuis le deuxième millénaire avant JC.
Une petite remarque : ne soyez pas étonnés que cette date du 21 décembre se soit transformée en 25 décembre : c’est dû à une erreur lors du passage par Jules César du calendrier lunaire au calendrier solaire, dit « calendrier julien », le nôtre encore actuellement. Une erreur qui perdurera et donnera sa date à la Fête de la nativité !
La nuit de Yaldâ donc, au solstice, est la plus longue nuit de l’hiver ; une nuit de bataille sans merci entre l’Ombre et la Lumière. Après cette nuit, les jours deviennent plus longs, la Lumière gagne sur les Ténèbres. C’est pourquoi on l’appelle « nuit de la naissance du soleil », ou « nuit de la lumière ».
D’un point de vue religieux, cette fête célèbre en même temps la veille de la naissance de Mithra, déesse du Soleil, symbole de lumière et de bonté.
Ces traditions sont héritées du culte zoroastrien, en Iran.
Yule
Mais, environ à la même époque, nous pouvons aussi regarder vers l’Europe.
Les anciens Scandinaves célébraient une fête païenne s’appelant Yule, qui prend ses racines près de 2000 ans avant notre ère et qui, elle aussi, est intimement liée au solstice d’hiver.
On y célèbre le moment de l’année où la roue des saisons tourne : le Roi de Houx, dieu-arbre représentant l’obscurité de la fin d’année perd son combat contre le Roi de Chêne, dieu-arbre représentant la lumière des jours nouveaux.
Dans cette région du monde où les ressources se font rares en cette période de l’année, la renaissance du soleil annonce le retour de la prospérité et de la richesse liées aux récoltes.
Une fois de plus, on célèbre la lumière qui gagne sur les ténèbres !
Sans aborder tous les détails de Yule, qui n’entrent pas exactement dans le sujet, mais qui ont de nombreux points communs avec Noël, nous pouvons tout de même noter que, au sommet des arbres, la décoration la plus courante était le pentagramme, cette fameuse étoile présente tant en Europe qu’en Inde !
Diwali (ou Divali), la fête de la lumière
Voyez-vous mieux maintenant le lien avec Diwali ?
La fête la plus importante en Inde, où l’on célèbre la victoire de la lumière sur les ténèbres, de la connaissance sur l’ignorance, et du bien sur le mal.
Diwali, dont le nom vient du sanskrit « dipavali », qui signifie « rangée de lumières », et est connue pour ses lampes à huile d’argile que les Indiens alignent devant leur maison, ou bien sur leur toit au Kérala … comme pour Noël !
Diwali, calqué sur le calendrier lunaire hindou, est fêté un peu avant Noël ; cette année en 2022, Diwali a débuté le 22 octobre, et la journée la plus importante a eu lieu le 24.
Il existe plusieurs versions des origines de Diwali, qui varient selon l’endroit et la communauté où l’on se trouve. Mais ces versions présentent ceci de commun qu’elles sont des récits épiques racontant la victoire de héros ou divinités considérés comme des incarnations de Vishnu : dieu dont le rôle est de rétablir l’équilibre entre bien et mal, de faire gagner la Lumière sur les Ténèbres.
De même qu’à Noël, on retrouve les réunions de famille et l’illumination de lampes d’argile, qui symbolisent la lumière intérieure protégeant chaque foyer des ténèbres spirituelles.
Il me reste à vous souhaiter une merveilleuse fête des lumières, un merveilleux Noël qui, par-delà l’apparente diversité, marque l’unité d’un processus initiatique. Une origine et une signification communes en réalité, indissociables de ce rythme de la nature dont nous faisons tous partie.
Rappelons-nous de profiter de cette longue nuit d’hiver pour prendre un moment et nous recueillir symboliquement à l’intérieur de nous-mêmes. Méditer sur la nuit, les ténèbres, et nous préparer à accueillir le retour de la lumière.
Joyeux Noël à vous tous !
Si cet article t’a plu, pense à le partager dans tes réseaux sociaux favoris. 🙂